Une ordonnance n° 2021-1652 du 15 décembre 2021 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine des obligations d’information, de la gouvernance des produits financiers et des limites de position des investisseurs destinées à faciliter le financement des entreprises vient d’être publiée au Journal officiel (JORF, 16 déc. 2021, texte n° 20).
Cette ordonnance vise à transposer la directive (UE) 2021/338 (« Quick Fix ») qui procède à des ajustements ciblés de la directive « MiFID2 » (directive 2014/65/UE) afin d’encourager le financement de l’économie européenne par les marchés financiers et les entreprises d’investissement dans un contexte de reprise économique et de besoin accru de financements dans le contexte de la crise liée à la covid-19.
Rappel du contexte d’élaboration
Afin d’encourager le financement de l’économie européenne par les marchés financiers et les entreprises d’investissement dans un contexte de reprise économique et de besoin accru de financements marqué par la crise sanitaire, la Commission européenne avait, en juillet 2020 et février 2021, proposé une initiative législative de relance appelée « Train de mesures de relance par les marchés de capitaux » (Capital Markets Recovery Package-CMRP). Elle consistait en la révision de plusieurs textes européens, et notamment la directive 2014/65/UE sur les marchés d’instruments financiers (directive MiFID 2) par l’adoption d’une directive (UE) 2021/338 du 16 février 2021 (directive CMRP MiFID ou Quick Fix). Cette révision était assurée en droit français par l’article 43 de la loi n° 2021-1308 du 8 octobre 2021 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine des transports, de l’environnement, de l’économie et des finances (dite loi DDADUE) qui habilitait le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la transposition de la directive (UE) 2021/338 du 16 février 2021 modifiant la directive 2014/65/UE en ce qui concerne les obligations d’information, la gouvernance des produits et les limites de position.
Quatre domaines de la réglementation des marchés d’instruments financiers sont principalement concernés.
1.- Allègement de certaines obligations d’information des entreprises d’investissements vis-à-vis de leurs clients professionnels. Le mode de communication entre les entreprises d’investissement et leurs clients professionnels devient, par défaut, le format électronique (C. mon. fin. art L 311-8 al. 1er modif. par O. n° 2021-1652, art. 1er).
En outre, afin de se conformer à l’article art. 1er 4) a) de la directive (UE) 2021/338, l’ordonnance allège certaines obligations d’information des entreprises d’investissement vis-à-vis de leurs clients professionnels :
- suppression de la publication d’un rapport hebdomadaire présentant les positions agrégées détenues par différentes catégories de personne sur un instrument dérivé sur matières premières (C. mon. fin. art. L 420-16, I. modif. par O. n° 2021-1652, art. 4) ;
- suppression de l’analyse coût-avantage que sont tenus de fournir les PSI à leurs clients professionnels lorsque ces derniers souhaitent changer leur stratégie d’investissement en changeant la composition de leur portefeuille de produits financiers (sauf si les clients professionnels souhaitent le maintien de cette obligation actuelle) (C. mon. fin. art. L 533-13, I. bis. modif. par O. n° 2021-1652, art. 9) ;
- suppression de l’obligation pour les PSI de fournir à leurs clients professionnels un compte rendu des services qu’ils leur rendent mentionnant en particulier les coûts liés aux transactions effectuées et aux services fournis (C. mon. fin. art. L 533-13, I. bis. modif. par O. n° 2021-1652, art. 9) ; et
- suspension jusqu’au 28 février 2023 du rapport périodique annuel sur la qualité d’exécution des plates-formes de négociation prévue à l’article L 420-17 du code monétaire et financier ( mon. fin. art. L 420-13 modif. par O. n° 2021-1652, art. 14).
2.- Autorisation de la fourniture conjointe de services d’exécution et de recherche sur les émetteurs dont la capitalisation n’excède pas 1 milliard d’euros. Afin de promouvoir la visibilité des PME européennes sur les marchés financiers, l’article 1er 4) b) de la directive (UE) 2021/338 autorisait la fourniture conjointe de services d’exécution et de recherche sur les émetteurs dont la capitalisation n’excède pas un milliard d’euros. Un nouvel article L 533-12-4-1 est inséré et précise les conditions de cette autorisation : conclusion d’un accord préalablement à la fourniture des services précisant les frais combinés ou paiements conjoints ; information des clients des paiements conjoints versés aux prestataires de recherche … (C. mon. fin., art. L 533-12-4-1 nouv. créé par O. n° 2021-1652, art. 8).
3.- Pour certains titres obligataires, exemption des obligations relatives au régime dit de la « gouvernance des produits » qui encadre les règles de commercialisation des produits financiers en fonction des profils de la clientèle. L’article 12 de l’ordonnance n° 2021-1652 insère un nouvel article L 533-24-1-1 qui dispose que les PSI qui conçoivent des instruments financiers destinés à la vente aux clients ou qui proposent, recommandent ou commercialisent des instruments financiers ne sont pas soumis aux obligations de la « gouvernance des produits » lorsque le service d’investissement qu’ils fournissent porte sur des obligations qui n’incorporent pas d’instrument dérivé autre qu’une clause de remboursement avec indemnité de remboursement anticipé (« make whole ») (C. mon. fin. art. L 533-24-1-1 nouv. créé par O. n° 2021-1652, art. 12). L’objectif de cette exemption est de faciliter le financement des entreprises européennes par les marchés obligataires.
4.-Aménagement du régime des limites de position sur les instruments dérivés de matières premières. Les articles 2 et 3 de l’ordonnance adaptent le régime relatif aux limites de position sur instruments dérivés sur matières premières pour tenir compte des aménagements introduits par la directive (UE) 2021/338 Quick Fix (C. mon. fin. art. L 420-11 et L 420-13 modif. par O. n° 2021-1652, art. 2 et 3). Ils définissent notamment les instruments dérivés sur matières premières considérés comme étant d’importance critique ou significative et précisent les entités auxquelles les limites de position ne s’appliquent pas. L’AMF peut réexaminer les limites de position en cas de modification significative sur le marché. Elle notifie à l’ESMA les limites de position qu’elle entend fixer. Selon l’avis rendu par cette dernière à la suite de la notification, l’AMF modifie les limites de position ou lui fournit une justification expliquant pour quelle raison cette modification n’est pas jugée nécessaire.
Entrée en vigueur. Les mesures contenues dans l’ordonnance entrent en vigueur à partir du 28 février 2022 (O. n° 2021-1652, art. 16) et ce, conformément à l’article 4 paragraphe 1er alinéa 2 de la directive (UE) 2021/338. L’article 15 de l’ordonnance introduit en outre les mesures d’extension expresse aux collectivités d’outre-mer du Pacifique.
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Textes
Commission européenne
Commission européenne, Train de mesures de relance par les marchés des capitaux : le Conseil adopte une première série de mesures pour aider les entreprises à accéder au financement (communiqué de presse), 15 fév. 2021
ANSA
ANSA, LOI DDADUE n° 2021-1308 du 8 octobre 2021, 12 octobre 2021