L’Autorité des marchés financiers (AMF) vient de publier une recommandation DOC-2021-06 comprenant une synthèse de ses travaux de revue des états financiers annuels menés entre octobre 2020 et septembre 2021 (1) et ses recommandations concernant l’arrêté des comptes 2021 (2).

1.- Travaux de revue des états financiers annuels menés par l’AMF entre octobre 2020 et septembre 2021. Les points d’attention les plus fréquents ont porté sur les tests de dépréciation des actifs non financiers (notamment les informations fournies sur les hypothèses opérationnelles utilisées et les analyses de sensibilité) et les informations sur le risque de crédit (dépréciation des créances clients, programme d’affacturage). La reconnaissance du chiffre d’affaires fait également l’objet de recommandations, souvent afin de clarifier le lien entre la présentation de leurs activités et les principes de reconnaissance des revenus. Par ailleurs, l’AMF illustre également cette partie de quelques cas pratiques spécifiques rencontrés, par exemple la reconnaissance des impôts différés, le classement en équivalents de trésorerie, le traitement comptable des libérations de surface ou encore des SPAC. Enfin, l’AMF souligne l’obligation d’application du format ESEF aux rapports financiers annuels 2021.

 

2.- Recommandations pour l’arrêté des comptes 2021. La recommandation AMF 2021-06 reprend largement les recommandations de l’ESMA en les adaptant au contexte spécifique français. Ces recommandations s’adressent principalement aux sociétés qui préparent leurs états financiers selon le référentiel IFRS en vertu du règlement européen IAS n° 1606/2002.

2.1.- Evaluation et description des impacts financiers des risques environnementaux. L’AMF souligne la nécessité d’assurer des liens entre les sujets extra-financiers (notamment les sujets climatiques) et les états financiers tout en appuyant sur leur caractère évolutif (notamment en matière réglementaire).

Cette mise en évidence répond à l’accroissement des attentes des investisseurs et résulte de l’impact parfois lourd pour certains émetteurs des changements climatiques sur la performance financière, soit à raison de l’impact direct des modifications climatiques soit à raison des engagements pris par l’émetteur pour atteindre certains objectifs bas-carbone.

L’AMF précise d’ores et déjà que des réflexions complémentaires devront être menées au cours des prochaines années.

De façon générale, le niveau d’information fourni devra être proportionnel aux enjeux et à la matérialité que représentent les changements climatiques pour l’entité. Pour ce faire, celle-ci pourra se référer au document éducatif de l’IASB (2017) pour la détermination de la matérialité.

En pratique, bien que les normes IFRS ne traitent pas spécifiquement des conséquences comptables des changements climatiques, elles traitent des risques et les entités pourront valablement se référer à certains principes généraux contenus dans les normes IFRS ainsi qu’à des points d’analyse spécifiques, notamment ceux tirés du document Effects of climate-related matters on financial statements de l’IASB (nov. 2020) qui recense et illustre, norme par norme, les impacts potentiels du changement climatiques sur les états financiers :

  • modification de la trajectoire de chiffre d’affaires et de performance financière ;
  • dépréciation de certains actifs non financiers ; modification des durées d’amortissements et prise en compte du risque d’obsolescence accélérée ;
  • provisions à caractère environnemental (litiges, taxes, coûts d’assurance majorés) ;
  • charges induites par des modifications des processus de fabrication ou des coûts de transports.

L’ESMA, comme l’AMF, insiste sur la nécessaire cohérence des différentes hypothèses prises pour évaluer cet impact avec les scenarii développés dans la DPEF.

2.2.- Suivi des effets de la covid-19. Du fait de la poursuite de la pandémie et dans le prolongement des recommandations 2020, une seconde partie de la recommandation DOC-2021-06 aborde ce thème. De façon générale, l’AMF insiste sur la nécessité de transparence dans un contexte 2021 marqué par un manque de visibilité quant à l’évolution de la crise sanitaire et à son impact sur l’économie (étant encore relevé une diversité des situations selon les sociétés).

Concernant le risque de liquidité et la continuité d’exploitation, l’AMF recommande aux entités de poursuivre les efforts de transparence, en présentant notamment les informations les plus à jour et les plus spécifiques (lignes de crédit disponibles, évolution de l’activité, plan de réorganisation etc.).

Concernant l’affacturage ainsi que l’affacturage inversé dont le recours s’est accru dans un contexte de recherche de liquidité et d’optimisation des flux de trésorerie, l’AMF souligne en substance l’importance d’une information suffisamment détaillée pour informer sur la gestion du risque de liquidité. Il appartient donc aux sociétés de décrire les programmes (contexte, motifs, caractéristiques, modalités) et d’indiquer les montants, l’analyse effectuée ainsi que le classement comptable retenu au bilan et dans le tableau de flux de trésorerie. En outre, l’AMF recommande de compléter l’information au titre du risque de liquidité, comme la dépendance à ces programmes.

Enfin, s’agissant des aides et mesures gouvernementales, l’AMF recommande aux sociétés significativement concernées par des mesures d’aides gouvernementales de préciser, par grande typologie d’aides (prêts, exonérations de charges ou d’impôt, mesures compensatoires, etc.) et, le cas échéant, par zone géographique, les caractéristiques des aides obtenues, le traitement comptable (en particulier pour les prêts garantis par l’Etat en cas de prorogation), le classement retenu dans les états financiers (tant au bilan qu’au compte de résultat) et leurs impacts (également dans le tableau de flux de trésorerie). Au titre du risque de liquidité, les sociétés sont également invitées à préciser l’évolution attendue de ces aides (arrêt, remboursement, plafonnement, etc.) et les incertitudes afférentes, en indiquant les relais de croissance prévus.

2.3.- Institutions financières. Une partie spécifique est consacrée aux institutions financières autour du risque de crédit. Cette partie souligne l’importance d’informations détaillées sur les expositions, les dépréciations ainsi que le modèle de détermination des pertes de crédit attendues.

Cet aspect n’est pas couvert dans la présente brève.

 

oOo

 

Autorité des marchés financiers (AMF)

Arrêté des comptes 2021 : l’AMF publie ses recommandations et les résultats de ses récents travaux de revue des états financiers (Communiqué de presse du 29 octobre 2021)

Recommandation DOC-2021-06 : Arrêté des comptes 2021 et travaux de revue des états financiers (applicable au 29 octobre 2021)

 

ESMA

European common enforcement priorities for 2021 annual financial reports (ESMA32-63-1186, 29 octobre 2021)

 

IASB

IFRS Practice Statement 2: Making Materiality Judgements (2017)

Effects of climate-related matters on financial statements (novembre 2020)