La loi n° 2021-1774 du 24 décembre 2021 visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle (dite loi Rixain) vient d’être publiée au Journal officiel (JORF, 26 décembre 2021, texte 1).

Pour mémoire, cette loi procède d’une proposition portée par la députée LREM et présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, Marie-Pierre Rixain. La facilitation et la recherche de l’égalité et de la parité au sein des entreprises n’est pas nouvelle puisque la loi n° 2011-103 du 27 janvier 2011 (dite loi Copé-Zimmermann) avait déjà modifié le code de commerce pour imposer des quotas de femmes dans les conseils d’administration et de surveillance. Faisant écho à celle-ci, la proposition de loi (PPL) dite Rixain déposée le 8 mars 2021 au bureau de l’Assemblée Nationale avait elle aussi pour objectif d’accélérer l’égalité économique et professionnelle en instaurant cette fois des quotas de représentation minimale de chaque sexe au sein des postes à plus hautes responsabilités.

Il est à noter qu’un décret en Conseil d’Etat venant préciser certaines modalités d’application de la loi est pour l’heure en attente de publication mais les conséquences pour les entreprises sont d’ores et déjà les suivantes.

1.- La loi introduit de nouveaux quotas dans les postes de direction des grandes entreprises

 Poursuivant le processus entamé en faveur de la mixité des conseils d’administration et de surveillance de la loi Copé-Zimmermann, la loi n° 2021-1774 du 24 décembre 2021 insère deux nouveaux articles dans le code de commerce et dans le code du travail et impose en conséquence l’obligation pour les entreprises de respecter une nouvelle obligation de quota.

Introduction de la notion d’« instance dirigeante » dans le code de commerce. Le nouvel article L 23-12-1 du code de commerce (C. com. art. L 23-12-1 nouv. créé par L. n° 2021-1774, art. 14), inséré dans un nouveau chapitre XII « De la mixité dans les instances dirigeantes des sociétés commerciales » (titre III du livre II), définit l’instance dirigeante comme « toute instance mise en place au sein de la société, par tout acte ou toute pratique sociétaire, aux fins d’assister régulièrement les organes chargés de la direction générale dans l’exercice de leurs missions ». Entreront dans cette définition, notamment, les comités exécutifs (CoMex) et les comités de direction (CoDir) des sociétés.

 

Quota progressif à respecter au sein des instances dirigeantes. L’article 14 de la loi du 24 décembre 2021 impose un nouveau quota à respecter puisque la proportion de personnes de chaque sexe au sein des cadres dirigeants (au sens de l’article L 3111-2 du code du travail) et des instances dirigeantes (telles que définies par ce nouvel article L 23-12-1) ne pourra désormais être inférieure à 30% (C. trav. art. L 1142-11 nouv. al. 3 créé par L. n° 2021-1774, art. 14, I, 1°, b)). Cette nouvelle obligation devra être satisfaite par toutes les entreprises qui, pour le troisième exercice consécutif, emploieront au moins 1 000 salariés.

Etant précisé encore que ce quota, fixé dès le 1er mars 2026 à 30% (L. n° 2021-1774, art. 14, III.) est progressif puisqu’il sera porté à 40% à compter du 1er mars 2029 (L. n° 2021-1774, art. 14, IV).

 

Sanctions en cas de non-conformité au nouveau quota. La loi instaure deux mécanismes de sanction.

Le premier est prévu au nouvel article L 1142-12 du code du travail qui dispose que l’entreprise disposera d’un délai de deux ans pour se mettre en conformité. L’entreprise devra, au bout d’un an, publier des objectifs de progression et les mesures de correction retenues, selon des modalités définies par décret (qui n’est pas encore publié à ce jour). A l’expiration de ce délai, si les résultats obtenus étaient toujours en deçà du taux fixé, l’employeur pourrait se voir appliquer une pénalité financière (1% de la masse salariale au maximum). Le montant sera fixé par l’autorité administrative, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d’Etat (en attente de publication), en fonction de la situation initiale de l’entreprise, des efforts constatés dans l’entreprise en matière de représentation des femmes et des hommes ainsi que des motifs de sa défaillance. Le produit de cette pénalité sera versé au budget général de l’Etat. Ce premier mécanisme de sanction entrera en vigueur le 1er mars 2029 (L. n° 2021-1774, art. 14, V).

Le second est prévu au nouvel article L 1142-13 du même code qui prévoit que la négociation sur l’égalité professionnelle (C. trav. art. L. 2242-1, 2°) portera également sur les mesures adéquates et pertinentes de correction. En l’absence d’accord prévoyant de telles mesures, celles-ci seront déterminées par décision de l’employeur, après consultation du CSE. La décision sera déposée auprès de l’autorité administrative dans les mêmes conditions que le plan d’action mentionné à l’article L. 2242-3 alinéa premier. L’autorité administrative pourra présenter des observations sur les mesures prévues par l’accord ou la décision de l’employeur, qui seront présentées à l’organe chargé de l’administration ou de la surveillance de l’entreprise ainsi qu’au CSE. Ce second mécanisme entrera quant à lui en vigueur le 1er mars 2026 (L. n° 2021-1774, art. 14, VI).

 

2.- Les écarts de représentation entre les femmes et les hommes devront par ailleurs être publiés

Dans les entreprises qui, pour le troisième exercice consécutif, emploient au moins 1 000 salariés, l’employeur publiera chaque année les écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes parmi les cadres dirigeants au sens de l’article L 3111-2 du code du travail, d’une part, et les membres des instances dirigeantes définies au nouvel article L 23-12-1 du code de commerce, d’autre part (C. trav. art. L 1142-11 nouv. al. 1er créé par L. n° 2021-1774, art. 14, I, 1°, b)).  Cette obligation de publication entrera en vigueur le 1er mars 2022 (L. n° 2021-1774, art. 14, II).

 Le deuxième alinéa de l’article L 1142-11 prévoit en outre que ces écarts de représentation seront rendus publics sur le site internet du ministère chargé du travail (par dérogation aux articles L 311-6 et L 312-1-2 du code des relations entre le public et l’administration), dans des conditions définies par un décret en attente de publication. Cette obligation entrera quant à elle en vigueur le 1er mars 2023 (L. n° 2021-1774, art. 14, III al. 1er).

 Il est à noter enfin que la base de données économiques, sociales et environnementales prévue à l’article L 2312-18 du code du travail devra comprendre en outre des informations sur les écarts de répartition entre les femmes et les hommes conformément à la nouvelle obligation prévue à l’article L 1142-11 alinéa 1er (C. trav. art. L 2312-18 al. 1ermodif. par L. n° 2021-1774, art. 14, I, 2°).

 

3.- La loi améliore la transparence concernant l’index de l’égalité (écart de rémunération) femmes-hommes en entreprise

 Pour mémoire, l’article 104 de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel avait inséré un article L 1142-8 dans le code du travail qui prévoit, depuis le 1er janvier 2019, que dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, l’employeur publie chaque année des indicateurs relatifs aux écarts de rémunération entre les femmes et les hommes et aux actions mises en œuvre pour les supprimer, selon des modalités et une méthodologie définies aux articles D 1142-2 et suivants.

Publication des écarts sur le site internet du ministère du travail. L’article 13 de la loi n° 2021-1174 du 24 décembre modifie cet article L 1142-8 : les entreprises devront rendre public l’ensemble des indicateurs composant la note finale de l’index sur le site internet du ministère du travail dans des conditions à déterminer par décret.

Obligations de communication lorsque les résultats obtenus par l’entreprise au regard des indicateurs mentionnés à l’article L 1142-8 se situent en deçà du niveau défini par décret. Dans cette hypothèse, l’employeur sera soumis à deux obligations : (i) communiquer d’une part en interne et en externe les mesures de correction adoptées dans le cadre de la négociation sur l’égalité professionnelle (C. trav. art. L 1142-9 al. 2 inséré par L. n° 2021-1774, art. 13, I., 2°) et (ii) fixer et publier d’autre part des objectifs de progression de chacun de ces indicateurs lorsque les résultats obtenus se situent en deçà d’un niveau défini par décret (C. trav. art. L 1142-9-1 créé par L. n° 2021-1774, art. 13, I., 3°). Ces deux nouvelles mesures seront applicables à compter de la publication des indicateurs effectuée en 2022 (L. n° 2021-1774, art. 13, II).

 

4.- Dispositions diverses

La loi n° 2021-1774 comporte d’autres dispositions de mixité au sein des organes des sociétés d’assurance mutuelle (L. n° 2021-1774, art. 15), des comités d’investissement de la Banque publique d’investissement (L. n° 2021-1774, art. 16) ou des sociétés de gestion de portefeuille (L. n° 2021-1774, art. 17).

Enfin, il est à noter que les deux amendements adoptés par le Sénat le 27 octobre dernier ont été supprimés : il s’agit de l’article 7 bis A qui visait à instituer un Comité des nominations dans les sociétés d’une certaine taille (nombre moyen d’au moins 250 salariés permanents, montant net du CA ou total du bilan d’au moins 50M€) et de l’article 7 bis B qui réduisait de 5 à 3 le nombre de mandats d’administrateurs exerçable par une même personne physique.

 

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Textes

Loi n° 2021-1774 du 24 décembre 2021 visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle